CERU

Par Jean Costentin

Le 6 novembre 2012 à 16h34

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Ceux qui requièrent « l’expérimentation » de salles d’injections de drogues aux toxicomanes, médicalement assistées, avancent trois justifications: éliminer de la rue le triste spectacle de toxicomanes s’injectant leur drogue ; réduire les risques d’overdoses ainsi que de contamination par les virus du SIDA ou des hépatites ; Entrer en contact avec certains toxicomanes pour les convaincre d’entrer dans un processus de soins. Nous répondons ici à ces arguments, en montrant leurs faiblesses et faux semblants, en rappelant les dispositifs disponibles en France, et en montrant que la « réduction des risques » escomptée en comporterait divers autres, encore plus graves que ceux qu’ils prétendent combattre.

Notons tout d’abord que notre pays n’a pas la culture de l’expérimentation ; le char de l’Etat français ne semble ne pas doté de marche arrière ; dès lors la notion d’expérimentation est un subterfuge pour l’institutionnalisation de ces salles de shoots.

La réduction des risques encourus par les toxicomanes est une préoccupation à laquelle nous adhérons. Néanmoins, les plus grand des risques résident : dans l’accroissement du nombre des toxicomanes, que ne manquerait pas de produire une image quasi légalisée de la drogue avec l’installation d’un confort accru pour celui qui s’y adonne ; et dans un ancrage des toxicomanes dans leurs addictions.

L’ouverture de ces salles de shoot cumulerait plusieurs aberrations :

– L’Etat contribuerait ainsi à dédramatiser le phénomène toxicomaniaque ;

– L’Etat organiserait la désobéissance à la loi, en finançant à l’intérieur de ces salles de shoots, ce qu’il interdit à l’extérieur (à moins de légaliser toutes les drogues, ce qui est d’ailleurs une revendication d’un certain nombre de ceux qui militent pour ces salles de shoots) ;

– L’Etat devrait divertir (dans un contexte économique difficile) des fonds qui seraient inévitablement pris sur les structures prenant en charge, en amont, les toxicomanes, alors que ces structures déclarent manquer de moyens et que les indispensables actions de prévention des toxicomanies ne sont même pas financées.

Cette « expérimentation » veut reproduire ce qui se fait dans quelques autres pays. On s’étonnera que depuis le temps qu’y fonctionnent ces salles de shoots, elles en soient restées au stade expérimental, quand elles n’ont pas été fermées ; ce que recommande d’ailleurs l’OICD (office international de contrôle des drogues).

Soulignons que ces pays n’ont pas mis en place tout ce que la France a organisé en amont de ces salles de shoots : La dispensation libre des seringues ; l’échange de seringues neuves contre les seringues utilisées ; les stéribox ; dans certains centres le don de seringues ; les CAARUD (centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues) ; les CSAPA (centres de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie), les centres d’accueil des toxicomanes (fixes ou ambulants) ; les programmes méthadone, ou buprénorphine à haut dosage (Subutex®, dont il faut dénoncer ici qu’une part très importante de ce « Subu est », à prix d’or, scandaleusement détournée, tandis qu’il n’est presque jamais administré à doses dégressives, pour atteindre l’abstinence) ; des structures hospitalières, des cliniques spécialisées ; des associations d’accueil et de traitement des toxicomanes….

Comment des médecins, engagés, par le serment d’Hippocrate à ne pas mettre leur savoir au service de la corruption des mœurs, pourraient concourir à l’administration des toxiques qui sont la cause de la maladie grave des toxicomanes ? L’empathie due au toxicomane, ne doit pas virer à la collusion. Comment pourraient-ils devenir complices de l’administration de ces « drogues de la rue » amenées par les toxicomanes, alors qu’ils savent que ces drogues sont très impures, adultérées par les coupages opérés en série, avec des substances souvent impures et parfois toxiques. Comment pourraient-ils admettre l’injection de solutions non stériles ? Très vite surgirait l’idée de la vente sur place d’une héroïne irréprochable (« médicale »). Comment les toxicomanes se l’achèteraient, puisque ce ne serait plus de leurs coupages de la drogue qu’ils retireraient leur quote-part… Viendrait alors, évidemment, le moment de leur offrir. Ainsi serait satisfaite la revendication ultime des toxicomanes ; « leur » drogue servie gratuitement, ad voluntatis, administrée dans des conditions confortables et de complète sécurité.

A qui incomberait la responsabilité des exactions que pourrait commettre, ou des accidents que pourrait provoquer le toxicomane sous l’empire de la drogue qui vient de lui être injectée dans une salle de shoot ? Au médecin (grandeur et servitude !).
Quelles doses d’héroïne ? Combien de fois par jour ? Des limites ont été fixées dans certains centres étrangers (6 fois par jour à Genève). Néanmoins, il a été mis en évidence, dans le sang de certains « clients » de ces centres, la présence de l’héroïne de la rue (que l’on sait distinguer par certaines analyses). Ainsi s’annihilent à l’extérieur les précautions mises en œuvre à l’intérieur…..

Des particuliers et, avec eux, des édiles municipaux s’irritent que dans leur(s) rue(s), des toxicomanes s’injectent des drogues, puis laissent trainer leurs seringues…. Ils attendent de ces salles de shoots, l’amélioration de l’ambiance, sans imaginer la concentration des toxicomanes à l’entour de ces salles, leurs va et vient et le négoce opéré par les dealers. Voyant l’enthousiasme des riverains à accueillir la construction d’une prison, pourtant bien close, dans leur quartier, surgit la question : qui voudrait une salle de shoots dans le sien ?

La prévention de la contamination par les virus du SIDA ou de l’hépatite, se pose surtout chez le jeune toxicomane, qui ne devrait pas être le client de ces salles, (à moins d’en faire les centres d’apprentissage de la toxicomanie par injection). Les toxicomanes concernés, ayant un long passé de toxicomanies soit sont déjà contaminés par ces virus, soit ont depuis l’origine de leur errance respecté une prophylaxie adaptée.
La prévention des surdoses ne serait pas assurée, faute de pouvoir déterminer extemporanément le degré de coupage du produit amené. L’héroïne qui sera injectée sera-t’elle coupée au 4/5, (ce qui n’est pas exceptionnel), ou sera-t’elle pure ?

Nous avons présent à l’esprit la mort d’un individu provoquée par la prescription de méthadone, après avoir fait croire à son médecin qu’il était un héroïnomane en proie aux troubles de l’abstinence. Au mieux l’appel du SAMU sera sans doute plus rapide.
La France a fait beaucoup plus que d’autres pays n’ont fait en amont de leurs « salles de shoots » ; elle est plus que d’autres pays confrontée au péril toxicomaniaque, rien ne devrait être fait qui contribue à dédramatiser l’image de la drogue. Nous devrions mieux évaluer, mieux encadrer, mieux contrôler le fonctionnement de toutes les structures déjà mises en place, afin d’améliorer, le cas échéant, leur fonctionnement. Fort de l’interdit des drogues, tout toxicomane pris en flagrant délit de deal ou d’injection doit être confié à un centre assurant sa prise en charge pour la mise en œuvre d’un sevrage médicalement assisté, sans oublier l’efficacité des sevrages « secs » qui sont pour le moins rigoureux.

On est très troublé que certains addictologues, que l’on n’entend jamais dans des actions de prévention des toxicomanies auprès de la jeunesse, se fassent tonitruants pour requérir la dépénalisation du cannabis et véhéments pour obtenir l’ouverture de ces salles de shoots. Cette attitude (stratégie ?), si elle est de nature à hypertrophier leur patientèle et à décupler l’importance de leur spécialité, ne saurait résoudre les problèmes des toxicomanes…

Plus qu’une fausse bonne idée, les salles de shoots seraient, dans le dispositif français de prise en charge des toxicomanies, une vraie mauvaise idée ! .

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