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Le 6 septembre 2012 à 20h00

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Extrait de l’article paru dans Valeurs Actuelles le 6 septembre 2012.

MOINS DE NOTES

Est-ce de la dialectique (Peillon est agrégé de philosophie) ou de la langue de bois ? Le 28 août, le ministre de l’Éducation s’est dit contre la suppression des notes à l’école tout en plaidant pour un système – « l’évaluation formative » – qui, s’il était appliqué, conduirait à leur abandon. « Il faut, a-t-il dit, qu’il y ait une évolution de la façon dont nous notons. […] La note doit pouvoir être aussi un encouragement et pas un découragement, parce que les élèves français, à part les petits Japonais, sont les plus malheureux au monde. »

Qu’un ministre de l’Éducation nationale puisse assurer, sans la moindre preuve, que les jeunes Français sont parmi les plus malheureux au monde est pour le moins surprenant. Ce n’est pourtant pas la première fois que Vincent Peillon associe l’échec scolaire et le désarroi des élèves à leur notation. Le 2 juin, il avait estimé devant les parents de la Peep que l’évaluation, perçue comme une sanction, était source de souffrances. Et de plaider pour un « changement de pédagogie » afin de placer le « bien-être des élèves » au coeur du projet scolaire.

Ce raisonnement spécieux court à gauche depuis longtemps. « Les insuffisances de l’évaluation chiffrée sont facteur de stress et de compétition. Nous devrons favoriser une évaluation permettant de valoriser les progrès, les efforts et les compétences acquises », affirmait le PS en 2010. « Ce système de notation, et l’obsession du classement auquel il répond, crée dès l’école élémentaire une très forte pression scolaire et stigmatise les élèves qu’il en ferme progressivement dans une spirale d’échec », affirme aussi l’Association de la fondation étudiante pour la ville, dont François Hollande a signé le “pacte national contre l’échec scolaire” en février.

Après Mai 68, le ministère avait déjà tenté de remplacer les notes par des lettres : A, B, C, D. Mais les enseignants y avaient ajouté des + et des – , reconstituant ainsi, souvent à la demande des parents et des élèves, un système de notation finalement abandonné. Actuellement, des collèges de La Rochelle utilisent un code couleur : rouge, orange, vert clair et vert foncé.

À Roubaix, les enseignants du collège Van-Der-Meersch avaient imaginé un système d’évaluation inspiré des jeux vidéo : chaque élève d’une classe de sixième devait construire un “mur de la réussite” à l’aide de briques correspondant aux compétences qu’il devait acquérir.

Le compte rendu de cette expérience, aujourd’hui abandonnée, se trouve sur Internet : « Le bilan n’est pas à la hauteur de nos attentes. […] Seuls trois élèves ont fait l’effort d’apprendre leurs conjugaisons, les autres ne s’en sont pas donné la peine et il semble que l’absence de note en est une cause aggravante. […] La conclusion est désolante mais il semble que la contrainte, assortie sans nul doute de valorisation verbale, reste le meilleur moyen de faire travailler des élèves dont le contexte social pousse à la passivité. »

Les expériences étrangères ne sont pas non plus très concluantes, comme le prouve une note du Centre d’études et de recherches universitaire de l’Uni : au Québec, le gouvernement a décidé de réintroduire les notes, qu’il avait supprimées en 2000 : le taux de réussite des élèves avait chuté de 7 points en français ; au Danemark, « le système de l’évaluation formatrice [sans note] a été abandonné à la suite des piètres résultats des élèves danois » ; en Suisse, les Genevois ont décidé par référendum de rétablir les notes dans leur canton.

Cette semaine, 80 % des Français se prononcent contre la suppression des notes à l’école, dans un sondage Ifop-Metro. Vincent Peillon aura-t-il la sagesse de les entendre ?

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