Universités: l’appel des intellectuels pour protéger la liberté d’expression

EXCLUSIF – Plus de 100 universitaires, intellectuels et essayistes s’inquiètent de la multiplication des actes de violence dans les universités, dans une tribune exclusive du Figaro.

Plusieurs événements récents démontrent que la liberté d’expression et de communication est entravée dans les universités françaises. Ces derniers mois, pas moins de cinq manifestations ont été annulées par des universités suite à des menaces émanant de groupes de pression divers et d’organisations d’extrême gauche. À chaque fois, les organisateurs ont renoncé au prétexte qu’ils ne seraient pas en mesure d’assurer la sécurité des participants et du public.

En janvier, la conférence sur la ruralité du député Jean Lassalle, à l’université de Lille, a été annulée sous la pression d’associations féministes et de SUD Solidaires, qui lui contestaient la faculté de parler en public à cause de son comportement jugé sexiste. À la Sorbonne, la représentation de la pièce Les Suppliantes d’Eschyle a été annulée en mars après l’appel au boycott d’associations dites antiracistes qui reprochaient à son metteur en scène d’avoir grimé les comédiens en personnes noires. Un mois plus tard, la conférence d’Alain Finkielkraut à Sciences Po a échappé de justesse à la censure après les menaces d’un groupuscule dénommé «Sciences Po en Lutte-Institut Clément Méric».

Voilà peu, la formation consacrée aux signaux de la radicalisation, dispensée par Mohamed Sifaoui à l’université Paris-I, a été annulée à la suite des critiques proférées par des associations islamistes selon lesquelles l’essayiste «stigmatise les musulmans». Et tout récemment, l’université de Bordeaux Montaigne a renoncé à la tenue de la conférence de la philosophe Sylviane Agacinski, opposée à la PMA pour toutes et à la GPA, à la suite d’un communiqué de plusieurs associations féministes et LGBT qui annonce que tout sera mis en œuvre pour que la conférence n’ait pas lieu.

Chaque fois que les universités cèdent à ces menaces, elles se déshonorent et trahissent leur mission. En effet, leur rôle est d’offrir un espace de confrontation des idées qui favorise la réflexion et non un espace où le conformisme intellectuel s’impose en maître. Elles doivent également favoriser l’émergence de l’esprit critique, qui suppose toujours d’analyser toutes les données d’un débat pour se forger ses propres convictions. C’est cet esprit critique qui permet de résister au dogmatisme, ce cancer de la pensée qui empêche toute découverte et asservit l’homme.

Les présidents d’universités peuvent et doivent assurer la tenue et la sécurité de ces conférences, en faisant, le cas échéant, appel aux forces de l’ordre.

Nous ne pouvons pas accepter que nos universités cèdent plus longtemps, par lâcheté, à ce chantage idéologique et ces menaces liberticides. La liberté d’expression doit être garantie et défendue par les présidents d’université, quitte à mobiliser les moyens dont ils disposent pour en assurer le respect. Forts de leur pouvoir de police, ils peuvent et doivent assurer la tenue et la sécurité de ces conférences, en faisant, le cas échéant, appel aux forces de l’ordre.

Les universités françaises doivent rester le lieu privilégié de l’échange des idées, des connaissances, des questions, dont surgit, parfois, le génie humain.

Cette tribune – dont l’initiative revient à Morgane Daury-Fauveau, professeure de droit privé à l’université d’Amiens, présidente du Ceru – a été cosignée par plus de 100 universitaires, intellectuels et essayistes.

Parmi ceux-ci figurent:
Georges Bensoussan, Historien
Pascal Bruckner, Philosophe et écrivain
Laurent Bouvet, Professeur de science politique à l’université de Versailles-Saint-Quentin
Philippe d’Iribarne, Sociologue
Luc Ferry, Philosophe
Alain Finkielkraut, Philosophe
Olivier Gohin, Professeur de droit public à l’université Paris-II-Assas
Serge Guinchard, Doyen honoraire de la faculté de droit de l’université de Lyon-III, recteur honoraire
Anne-Marie Le Pourhiet, Professeur de droit public à l’université de Rennes-II
Maurice Abiteboul, Professeur honoraire de littérature et civilisation anglaises de la Renaissance, Université d’Avignon
René Agostini, Professeur des Universités retraité
Laurent Alexandre, Chirurgien-urologue et essayiste
Eric Anceau, Maître de conférences en histoire, Sorbonne Université
Joël Andriantsimbazovina, Professeur de droit public, Université Toulouse 1 Capitole
Jean-Louis Auduc, Professeur d’histoire, ancien directeur-adjoint de l’IUFM de Créteil
Laurent Augier, Maître de conférences en économie, Université de La Rochelle
Marie-Thérèse Avon-Soletti, Maître de conférences honoraire en histoire du droit, Université de Saint-Etienne
Laurent Aynes, Professeur émérite de droit privé, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Olivier Babeau, Professeur et Président de l’Institut Sapiens, Université de Bordeaux
Francis Balle, Professeur émérite de science politique, ancien membre du CSA, Université Paris 2 Panthéon Assas
Martine Behar-Touchais, Professeur de droit privé, Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne
Guillaume Bernard, Maître de conférences en science politique, ICES
Norman Biga, Professeur de médecine, Université de Rouen
Guillaume Bigot, Directeur général de l’IPAG Business School, essayiste
Jean-René Binet, Professeur de droit privé, Université de Rennes 1
Nicolas Borga, Professeur de droit privé, Université de Lyon 3
Gérard Bramoullé, doyen honoraire de la faculté d’économie appliquée d’Aix- Marseille
Arthur Braun, Doctorant, Université de Lorraine
Rémy Cabrillac, Professeur de droit privé, Université de Montpellier
Jean-Marie Carbasse, Professeur émérite d’histoire du droit, Université de Montpellier recteur honoraire
Bernard Carayon, Avocat, ancien Maître de conférences à Science Po
Dimitri Casali, Essayiste, Professeur d’histoire
Gonzague de Chanterac, Maître de conférences en droit public, Science Po
Jean-François Chassaing, Maître de conférences honoraire d’histoire du droit, Université Paris Nanterre
Marie-Laure Cicile-Delfosse, Professeur de droit privé, Université de Rennes 1
Laurence Coiffard, Professeur, Pharmacie, Université de Nantes
Philippe Conte, Professeur de droit privé, Université de Paris 2 Panthéon Assas
Jean Costentin, Professeur émérite de Pharmacie, Université de Rouen
Martine Daoust, Professeur honoraire de pharmacie, Université de Picardie Jules Verne, Recteur
Marcel Darmon, Professeur émérite d’anglais, Montpellier
Morgane Daury-Fauveau, Professeur de droit privé, Université de Picardie Jules Verne, Présidente du CERU
Paul Deheuvels, Professeur émérite de mathématiques, Sorbonne Université, membre de l’Académie des sciences
Richard Desgorces, Professeur de droit privé, Université de Rennes 1
Olivier Deshayes, Professeur de droit privé, Université Paris Nanterre
Louis Doucet, Avocat, chargé de cours à l’ICES
Guillaume Drago, Professeur de droit public, Université Paris 2 Panthéon Assas
Pierre Dussol, Professeur honoraire d’économie, Université d’Aix-Marseille,
Pierre-Louis Fagniez, Professeur émérite de médecine
Daniel Fasquelle, Professeur de droit privé, Université du Littoral Côte d’Opale
Gilles Freyer, Professeur de médecine, Vice-doyen de l’UFR de médecine et maïeutique, Université Claude Bernard Lyon 1
Pierre Garello, Professeur d’économie, Aix-Marseille Université
Dominique Gency-Tandonnet, Maître de conférences en droit privé, Université Paris-Est Créteil
Michel Germain, Professeur émérite de droit privé, Université Paris 2 Panthéon Assas
François-Noël Gilly, Professeur de médecine, ancien Président de l’Université Claude Bernard Lyon 1
Marie Glinel, Doctorante, droit public, élue CNESER, Université Toulouse 1 Capitole
Jean-Pierre Goullé, Professeur de biochimie, Université de Rouen
Jean-Noël Grandhomme, Professeur d’histoire contemporaine, Université de Lorraine
Alexandre Grevet, Docteur en droit, Université Paris-Dauphine
Jean-Pierre Gridel, Professeur de droit privé, Université Paris Descartes, Conseiller doyen (h) à la Cour de cassation
Patrick Hetzel, Professeur de gestion, Université Paris 2 Panthéon Assas, Recteur
Gérard Hurpin, Maître de conférences en histoire, Université de Picardie Jules Verne
Édouard Husson, Professeur d’histoire contemporaine, Université de Cergy-Pontoise, ancien vice-chancelier des universités de Paris
Anastasia Iliopoulou, Professeur de droit public, Université Paris-Est Créteil
Arthur Jully, Doctorant, droit public, Université de Lorraine
Marie-Joseph Lamar, Maître de conférences honoraire en droit, Université Paris Descartes
Alain Laquièze, Professeur de droit public, Université Paris Descartes
Gwendoline Lardeux, Professeur de droit privé, Aix-Marseille Université
Thierry Le Bars, Professeur de droit privé, Université de Caen Normandie
Florence Leca Mercier, Maître de conférences en langue française, Sorbonne Université
Frédéric Monneyron, Professeur des Universités, Université de Perpignan Via Domitia, écrivain et sociologue de la mode
Barbara Lefebvre, Enseignante et essayiste
Claudia Lemarchand-Ghica, Professeur de droit privé, Université Paris-Est Créteil
Patrick Louis, Professeur IAE, Université de Lyon 3
Nathalie Martial-Braz, Professeur de droit privé, Université Paris Descartes
Arnaud Mercier, Professeur en Information-Communication, Université de Paris 2 Panthéon Assas
Jean-Pierre Mizon, Professeur (e.r.) de la Faculté de Médecine
Jean-Pierre Mouchon, Professeur honoraire de lettres, Aix-Marseille Université
Jean-Yves Naudet, Professeur émérite d’économie, Aix-Marseille Université
Florence Nicoud, Maître de conférences en droit public, Université de Nice Côte d’Azur
Jacques Nio, Docteur es sciences
Bertrand Pauvert, Maître de conférences en droit public, Université deHaute-Alsace
Pascal Perrineau, Professeur de science politique, Science Po
Charles Prats, Magistrat, délégué au développement de l’Association professionnelle des Magistrats
Michèle-Laure Rassat, Professeur émérite de droit privé, Université Paris-Est Créteil
Ingrid Riocreux, Enseignante et essayiste
Jacques Rougeot, Professeur émérite de langue française, Université de la Sorbonne
Christian Saint-Etienne, Professeur, Conservatoire national des arts et métiers
Olivia Sarton, Juriste pour l’enfance
Pierre Schweitzer, Maître de conférences associé en économie, Aix-Marseille Université
Samia Soultani-Vigneron, Enseignant chercheur, Le Mans Université
Philippe Stoeffel-Munck, Professeur de droit privé, Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne
Henri Suhamy, Professeur émérite de littérature, Université Paris Nanterre
Hervé Synvet, Professeur de droit privé, Université Paris 2 Panthéon Assas
Hélène Terrom, Maître de conférences en droit public,Université Catholique de l’Ouest
Eric Teyssier, Maître de conférences en histoire ancienne, Université de Nîmes
Alain Thorn, Magistrat
Renaud Tissot, Enseignant, Histoire-Géographie
Sophie Van Goethem, Maître de conférences en droit privé, Université de Nantes
Raymonde Vatinet, Professeur de droit privé, Université Paris 2 Panthéon Assas
Edouard Verny, Professeur de droit privé, Université Paris 2 Panthéon Assas
Olivier Vial, Président de l’UNI
Daniel Vigneau, Professeur de droit privé, Université de Pau et des Pays de l’Adour
François Viney, Maître de conférences en droit privé à l’Université de Picardie Jules Verne
Nicolas Warembourg, Professeur d’Histoire du droit, Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne

Podcast : La science sous pression

Pour faire le point sur les pressions qui pèsent sur la science, nous recevons Benoit Rittaud, mathématicien, maître de conférence à l’université Paris 13, président de l’association des climato réalistes et auteur de nombreux ouvrages dont « La Peur exponentielle » , et « Ils s’imaginaient sauver le monde »

 

 

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Médecins corrompus par les labos ? Une étude biaisée

La presse se délecte d’une étude sur le lien entre l’industrie pharmaceutique et les prescriptions des médecins. Et bien sûr on tape aveuglément sur l’ensemble des médecins !

La méthodologie de cette étude est intéressante, mais ses résultats sont compliqués à interpréter. Il manque en effet une donnée essentielle. Cette étude croise une base de données dans laquelle sont déclarés tous les dons déclarés en nature ou espèces dont bénéficient les médecins, et des indicateurs de qualité de prescription de l’Assurance Maladie.

Le groupe qui perçoit le plus gros montant de l’industrie pharmaceutique est aussi nettement plus masculin et a une plus forte activité de soins. Or ces deux caractéristiques sont exactement celles des médecins les plus âgés

Pyramide des âges des médecins généralistes source : medecindirect
Pyramide des âges des médecins généralistes source : medecindirect

(https://www.medecindirect.fr/…/Pyramide-des-âges-des-méde…).

L’article, qui est pourtant riche de détails, oublie tout simplement de mentionner l’âge des médecins… Nous pensons que les groupes de montants croissants déterminés par les auteurs sont des groupes d’âges croissants, mais qu’ils ont souhaité le dissimuler aux lecteurs.

Les « indicateurs de qualité » de l’Assurance Maladie disent tous la même chose.

Sur les onze indicateurs de qualité de prescription de l’Assurance Maladie, 5 portent sur la prescription de médicaments génériques, et les autres portent plus ou moins sur la reconduction systématique des ordonnances. L’autre indicateur est la conséquence directe de ce qui précède, il s’agit du montant moyen prescrit.

Cette étude nous montre donc tout simplement que les médecins les plus âgés prescrivent moins de génériques, et ont plus de difficultés à interrompre une prescription. Ces faits étaient déjà connus, mais sont bien éloignés de l’idée que des médecins seraient corrompus par l’industrie pharmaceutique.

L’étude indique clairement que l’état de santé des patients n’a pas pu être pris en compte, et qu’aucun lien de causalité ne peut être déduit de l’association statistique retrouvée.

De plus, le contenu de la base de transparence doit être interprété avec précautions.

Ainsi, par exemple, lorsqu’un médecin participe bénévolement à une journée de travail scientifique le weekend, mais que son billet de train est payé par le laboratoire organisateur, le billet de train est considéré comme un « avantage ». À cet égard le terme de « gift » employé dans l’article est assurément malhonnête. Le montant trouvé dans cette base est dans certains cas le simple reflet d’un engagement bénévole pour la collectivité. En revanche, lorsqu’un individu est en relation douteuse avec un laboratoire, la simple transaction via une association loi 1901 suffit à masquer totalement sa rémunération.

Au final, cette base est plus un traceur de l’implication pour la collectivité que de la prétendue corruption d’une profession. On peut regretter cependant qu’un tel outil n’existe pas pour certaines autres professions, comme, par exemple, les journalistes, ou nos élus.